Baléares

#063 – L’apocalypse selon…. Santa Ponsa !

  • 26 au 30 août 2023, Santa Ponsa, puis Cala Sa Puntassa et Cala Blanca, Majorque, Espagne.

Samedi 26 août, 1ère nuit à Santa Ponsa, calme et moins chaude que les nuits passées, ça aide à mieux dormir. Il fait beau et le mouillage est calme. Nous nous baignons le matin, mangeons tôt et allons à terre faire les courses. Il fait une chaleur étouffante et la corvée des courses porte bien son nom. Le supermarché Eroski n’est pas à côté et nous sommes chargés comme des mulets. De retour au bateau, nous ferons tranquille entre baignade et lecture.

Dimanche 27 août, 2ème nuit à Santa Ponsa. Nuit calme mais plus chaude que la veille.

Si bien que les enfants, n’arrivant pas dormir dans leurs cabines respectives, ont dormi torse nu sur le canapé du carré.

Louna ne voulant pas que je publie des photos d’elle “à poil” comme elle dit, j’y ai rajouté des fleurs, pour cacher ce qui doit l’être  😉

Nous nous levons assez tard. Le ciel est couvert et il commence à pleuvoir dès le matin.

Vu que la tempête – nommée Rea – est annoncée à partir de 17h, nous réfléchissons donc à aller à terre avant cet épisode qui s’annonce houleux.

Aurélia prépare le petit dèj, les enfants jouent. Des nuages noirs se forment au loin, on distingue encore le mega yacht ancré à l’entrée de la baie.

Un peu avant 11h, le ciel à l’entrée de la baie devient vraiment menaçant, un mur invisible à l’air de se rapprocher à toute vitesse.

Je le fais remarquer aux enfants afin d’observer cela, on ne distingue déjà plus le yacht, c’est bizarre.

Un voilier quitte à ce moment le mouillage, direction le large. Je ne sais pas si c’est une bonne idée, vu la situation générale.

En un éclair, un vent terrible accompagné de pluie se lève, le taud (petit toit en toile au-dessus du poste de barre) se met à vibrer, je décide d’aller le descendre (ce que je prévoyais de faire durant la journée, vu que ça ne devait arriver qu’à 17h).

Mais le vent devient encore plus fort et je n’arrive pas à défaire les attaches. Je crie à gorge déployée pour avoir de l’aide d’Aurélia mais elle ne m’entend pas, le vacarme du vent couvrant mes cris.

Les secondes semblent des minutes jusqu’à ce qu’elle vienne, enfin.

Je tiens tant bien que mal le taud pour qu’il ne se déchire pas plus et surtout qu’il ne s’envole pas, pendant qu’Aurélia, pas plus habillée que moi, défait les attaches.

La pluie s’est transformée en grêle, qui, poussée par le vent, vient nous percuter comme des salves de gravier. En short / t-shirt, ça ne fait pas du bien.

Après un instant, nous arrivons à le descendre et à l’attacher comme on peut. Les sangles volent au vent et me fouettent les cuisses jusqu’à ce que je puisse les bloquer. Je peux lire l’effroi sur le visage de mon épouse, choquée par la violence des éléments venus si soudainement.

Nous redescendons vite fait à l’abris mais le temps se déchaine encore plus.

Je monte à la barre pour allumer les moteurs et mettre les gaz pour contrer le vent et surtout tenter de soulager la tension sur notre ancre.

Il pleut des cordes, je suis en t-shirt, short, trempé jusqu’aux os, me faisant fouetté par cette pluie et ce vent infernal. Il pleut tellement que je ne vois rien !

A l’entrée de la baie, un bateau arrivé peu avant le coup de vent, n’avait pas eu le temps de rentrer ses voiles. Celles-ci se sont déchirées et flottent en haut de son mat tel un drapeau.

La VHF bipe et des messages de détresse apparaissent.

Des énormes vagues commencent à arriver, c’est apocalyptique.

Je tente comme je peux de maintenir le bateau droit mais la mer et le vent sont déchaînés.

Des débris volent autour de nous, d’abord une annexe, puis plusieurs coussins, croyant que c’était nos coussins situés à l’avant.

Un énorme pare-battage – aussi grand que moi – appartenant au yacht nous passera à côté.

Le vent et la pluie ne faiblissent pas, c’est l’enfer.

Petit à petit nous nous mettons à reculer, alors même que j’ai la marche avant enclenchée.

Je vois notre orin (bouée qu’on accroche sur l’ancre afin d’indiquée où elle se trouve) s’éloigner et surtout que nous nous rapprochions dangereusement du bateau de derrière. C’est impossible, nous n’avions pas mis autant de chaines !

Je crains que notre chaîne se soit détachée de notre ancre. Je mets plein gaz pour s’avancer à nouveau, mais les vagues jouent contre nous.

Aurélia vient m’apporter un ciré mais ce n’est pas le moment, je ne peux pas lâcher la barre, c’est bien trop dangereux.

Les autres bateaux autour de nous ne sont pas en meilleure posture.

Je vois un monocoque occupé par un couple d’un certain âge (pour ne pas dire de vieux) se rapprocher d’un autre, le percuter et voit la chaine de son ancre venir se coincer à l’arrière du bateau qu’ils viennent de percuter. Ça ne présage rien de bon. Après un moment, ils arrivent enfin à se défaire l’un de l’autre.

Le monocoque des vieux continue de reculer, se rapprochant des rochers. Ils décident de lever l’ancre, monsieur envoie madame à l’avant pour remonter l’ancre, mais la tempête fait rage.

Sous l’effet des vagues, le bateau se soulève et retombe à chaque fois violemment dans la mer, madame se prend des paquets de mer et le bateau va dans tous les sens. Pourvu qu’ils ne nous percutent pas !

J’essaie de m’éloigner d’eux le plus possible, on n’a pas besoin de ça en plus, c’est déjà assez la merde.

Après un certain temps, ils arriveront à leur fin et partiront direction le large.

De mon côté, je suis trempé et frigorifié, mes dents claquent les unes contre les autres tel un concert de claquette.

La tempête se calme enfin un peu, me permettant de donner la barre à Aurélia afin que je puisse descendre à l’abris pour me changer.

Les enfants prennent peur en me voyant dans cet état, Louna est en pleure car Aurélia était dans cet état quelques minutes auparavant.

Je me change en vitesse et enfile une veste avant de remonter au poste de barre.

C’est à ce moment-là que je vois que notre patte d’oie (cordage formant un triangle fixé de chaque côté du bateau et sur la chaine, afin de répartir le poids lorsqu’on est au mouillage) est cassée. Voilà la raison de notre instabilité ! Les 2 bouts pendouillent dans l’eau, ils ont été sciés par notre chaine durant l’apocalypse.

N’étant plus tenu par cette patte d’oie, notre chaine s’est déroulée, faisant reculer le bateau. Nous constaterons plus tard que presque la totalité de nos 80 mètres de chaine étaient sortis !

Le temps s’est enfin calmé et la tempête est passée. Nous craignons une deuxième salve, qui ne viendra jamais, bien heureusement.

Le ciel est toujours couvert et il règne une ambiance singulière. Tout le monde, nous comme les personnes sur les bateaux voisins, restons aux aguets et sommes quelque peu groggy par cet épisode de fin du monde.

Des bateaux sont collés contre les rochers, un voilier gît de côté, échoué sur la plage. D’autres petites embarcations se sont également échouées, des débris flottent ici et là, charriés contre les rochers.

(Les images ne sont pas de nous)

Nous apprendrons plus tard que 2 frères venus aider le voilier échoué ont réussi à encourager les badauds présents sur la plage pour remettre le bateau à flot ! L’union fait la force !

La tempête semblant ne plus revenir, je décide d’aller à la recherche de nos coussins perdus, avant qu’il ne soit trop tard.

Je descends l’annexe et commence mes recherches. Je récupérerai des coussins, qui ne sont malheureusement pas les nôtres, ainsi qu’un pare-battage.

La scène des abords du mouillage témoigne de la violence subie. Des branches d’arbres cassées, des petits bateaux retournés, d’innombrables déchets flottent et se cognent contre les rochers. Après plusieurs tours infructueux, je retourne au bateau.

Il faudrait aller voir sur la plage mais seul ce n’était pas possible. Nous y retournerons peut-être plus tard.

Il est temps de faire retomber la pression et de constater les dégâts.

Côté casse, la patte d’oie est à changer et le taud doit être recousu. Le drapeau français, lui, est définitivement mort !

Dans tous les cas, rien de bien méchant. Ça aurait pu être bien pire.

Nous apprendrons par la suite que Santa Ponsa, où nous nous trouvions, était le 3ème endroit de Majorque où la tempête avait été la plus violente. Nous nous sommes pris 65 nœuds (120 km/h) de vent dans la tronche !

Les images vues ensuite sur internet nous font réaliser dans quel enfer nous nous trouvions.

Les prévisions annonçaient un vent venant du nord, c’est pourquoi nous avions choisi Santa Ponsa comme lieu de repli, car bien protégée du nord, du sud et de l’est, mais ouverte sur l’ouest.

C’était sans compter sur l’effet de site qui a fait que le vent s’est engouffré dans la baie depuis l’ouest, causant ce malheur.

Nous avons pu récupérer plusieurs vidéos de différents points de vue. Les images parlent d’elles-mêmes…

Un des bateau voisin, Crazy Ivan a filmé la tempête… (no 1 sur la carte) :

credit @ Sailing Crazy Ivan

Eux aussi auront eu la patte d’oie cassée…

Vu de la terre, ce n’était pas mieux…

Vue de l’hôtel Punta del Mar (no 2 sur la carte) :

et pour finir vue du fond de la baie (no 3 sur la carte) :

En milieu d’après-midi, nous nous déplaçons pour aller nous ancrer au fond nord de la baie à Cala Sa Puntassa, devant la ville de Peguera, afin d’éviter les grosses vagues entrant dans la baie.

Le temps est très changeant, entre pluie torrentielle et arc-en-ciel, nous restons aux aguets.

Nous subirons un nouveau coup de vent vers 20h avec des rafales de maximum 37 nœuds, ça passe crème après ce qu’on a vécu. Je veillerai cependant toute la nuit, au cas où.

Aurélia est encore sous le choc et redoute un nouveau coup de vent. Louna, pour la rassurer, lui dira :

” Tu as peur ? T’inquiète pas Maman, Papa il gère ” 

Avoir la confiance de son équipage, ça n’a pas de prix ! Merci  😘

Récit de Louna sur la tempête Rea. Son récit a été retranscris, tel qu’elle l’a écrit, seules les fautes d’orthographe et de grammaire ont été corrigées.

La tempête réa

Cette tempête a été terrible et j’ai eu très peur. Ayden aussi.  😱  😱

On voyait au loin le vent qui arrivait.

En deux minutes la tempête s’est levée et la patte-d’oie s’est cassée.

A cause qu’elle s’est cassée nos quatre-vingt mètres de chaine se sont déroulés.

On était très près du cata derrière.

Ayden et moi, à ce moment-là, nous voulions être à l’école et habiter en maison.

Maman m’a préparé une tisane pour la gorge, mais en les voyant arriver, grelotant de froid, je leur ai donné ma tisane. Maman claquait des dents. 🥶

Il y avait aussi des bateaux échoués sur la plage et d’autres qui frottaient les rochers. Mais avec un papa qui gère, c’est super !!! 😉  👍

Merci Louna pour ton récit !  😘


Lundi 28 août, 1ère nuit à Cala Sa Puntassa. Le vent a soufflé modérément toute la nuit, avec de la houle de côté, pas des plus agréables mais c’est comme ça.

Etant donné la houle, nous nous redéplaçons à Santa Ponsa, pensant être protégé de celle-ci.

Ce qui ne fût pas le cas. Après deux essais de mouillage, nous repartons et allons nous mettre à la Cala Blanca, pas très loin d’ici. Tant pis pour nos coussins perdus.

Après une courte navigation, nous mouillons à Cala Blanca. Le mouillage n’a que quelques plaques de sable pour mouiller, le reste étant de la posidonie. Nous mouillons à plus de 10 mètres de profondeur.

Dans la journée, nous ferons un Monopoly tous ensemble.

C’est moi qui ai gagné 😎

Après plusieurs heures, nous remarquons que nous dérapons, nous sommes bien plus loin que l’endroit où nous avions jeté l’ancre. Je plonge pour tenter de voir ce qui se passe, mais l’eau est trouble et pleine de particules de posidonie, bloquant la visibilité.

Il faut dans tous les cas bouger. Nous remontons l’ancre et constatons que, en effet, nous n’étions pas dans du sable, mais dans la posidonie ! Vu la touffe qui pend sur notre ancre, nous avons dû bien la labourer.

Nous nous déplaçons donc un peu pour trouver une meilleure accroche. Il nous faudra 4 essais pour réussir enfin à tenir, hors de cette foutue posidonie !


Mardi 29 août, 1ère nuit à Cala Blanca. Bien qu’un coup de vent était encore attendu cette nuit, il n’est jamais venu.

Nous avons beaucoup de houle de côté, qui se calmera dans la journée. Pas de baignade aujourd’hui.

Louna est enrhumée et tousse beaucoup. La journée sera consacrée aux tâches administratives ainsi qu’au rangement.

Aurélia remets les coussins en place et constate, que finalement, nous en avons perdu qu’un petit !

On fait également sécher nos voiles d’ombrages et tout ce qui avait été trempé durant la tempête.

La vie reprend gentiment après la tempête, les bateaux moteurs reviennent dans la cala pour journée baignade et les promène-touristes également. Nous n’irons pas à terre aujourd’hui.


Mercredi 30 août, 2ème nuit à Cala Blanca, beaucoup plus calme.

Louna n’a pas bien dormi à cause de son nez bouché.

Aujourd’hui, pour les enfants, ce sera école et lecture. De mon côté, contrôle des moteurs et niveaux d’huile, car ils ont bien été sollicité durant l’épisode de Santa Ponsa.

Aurélia, elle, s’occupe de nettoyer autour de la chaine car à chaque remontée de l’ancre, de la rouille se dépose et salit le pont. J’essaierai de bricoler un système de brosse pour tenter d’enlever ces bouts de rouille avant qu’il n’arrive sur le pont, mais mon bricolage s’est révélé inutile.

Il faudra trouver autre chose.

En milieu d’après-midi, nous quittons Cala Blanca pour Sa Puntassa, afin d’y faire les courses. Nous jetons l’ancre près de la plage et allons à terre en annexe. Ça fait du bien de marcher à nouveau.

La ville est très touristique mais tout de même sympa. Nous allons au Mercadona faire le plein de nourriture, avant de retourner au bateau, manger, douche et au lit !

Demain, nous partons pour Ibiza…

2 Comments

    • Jo

      Oui, vraiment terrible mais on s’en sort bien, contrairement à certain.
      J’espère que tout va bien chez vous les terriens !
      Bonne continuation à vous et à bientôt !

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